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Marie, cousine remuée de germain
Marie Pauline Boucher est née le 30 juin 1878, 69 rue Saint-Pierre à Caen, de Paul Joseph Boucher, un journalier de 29 ans et demi, et Eugénie Cécile Ambroisine Sauton, 22 ans 3 mois, mariés à Mézidon en 1874. La naissance est déclarée à la mairie le 1er juillet 1878 en présence d'Alexis Boucher, 28 ans, cordonnier rue Saint-Pierre à Caen, oncle de l'enfant et Georges Crevel, 30 ans, ouvrier huilier, demeurant rue du Vaugueux à Caen. Par sa mère, Cécile Ambroisine Sauton, la petite Marie est la nièce à la mode de Bretagne de Bélina Valentine Botrel, la femme de Pierre Anatole Louvel. C'est donc une cousine "remuée de germain" des enfants de ces derniers, Pierre, Gustave, Louis et Léonie.
Épouser un horzain. Quand elle se marie à Caen le 9 février 1900, Marie Boucher est cordonnière. Elle demeure avec ses parents rue Neuve-Saint-Jean. Pour épargner la réputation de sa famille, on conservera un certain anonymat à
l'époux de Marie et il sera désigné par ses initiales AR. Le marié demeure de fait à Ernes où il est domestique, probablement dans une ferme du Fossard. C'est sans doute en rendant visite à sa cousine Léonie Louvel qui habite le hameau du Fossard que Marie Pauline a fait la connaissance de AR. C'est un horzain, c'est à dire un étranger au pays dans la terminologie normande, puisqu'il est né à Leigné-sur-Usseau, dans la Vienne, le 1er août 1878 d'un couple de cultivateurs .Lors du recensement de 1901, le couple réside à Ernes, route de Vendeuvre-au-Haut-d-Ernes. Lui est journalier à la ferme Croisy au hameau du Fossard à Ernes. Pourquoi Marie Pauline se retrouve-t-elle hébergée sans son mari AR chez Pierre Anatole Louvel cinq ans plus tard, en 1906 ?
Les vraies raisons d'une absence. Ce n'est certainement pas pour cause de période d'exercices militaires que AR n'est pas présent puisque, comme nous l'enseigne son registre militaire, il a été réformé. D'autre part, aucun enfant du couple n'est enregistré à Caen ou à Ernes jusqu'en 1912. Aucune mention marginale le mentionnant sur leurs actes de naissance, on sait que le couple n'a pas non plus divorcé (le divorce a été rétabli en 1884) et qu'aucun des deux ne s'est remarié. On sait par ailleurs avec certitude que l'absence de AR n'est pas causée par son décès prématuré puisqu'une mention marginale portée sur son acte de naissance, nous apprend qu'il meurt cinquante ans plus tard, en 1953, à Trissereux dans l'Oise. Pour sa part, Marie Pauline décède le 9 septembre 1946 à Saint-Rémy en Haute-Saône, peut-être déplacée loin du Calvados par la guerre de 1939-1945 ?
C'est le registre militaire qui nous fournit une explication possible, voire même probable, à la "disparition" du mari de Marie Pauline. En fait, ce dernier est ce qu'en Calvados on qualifie de galvaudeur ou encore de trimardeux (vagabond, clochard).
Les faits rapportés par le registre matricule sont éloquents :
* 1898 recensement militaire à Chatellerault avec le numéro 190
réside à Bréville, canton de Troarn (Calvados)
profession : bourrelier
Affectation d'active : 4e d'infanterie
Conseil de révision : bon, absent
* 1898 Le conseil de révision nous fournit une description du personnage : cheveux et sourcils châtains, yeux châtains, front ordinaire, nez moyen, bouche moyenne, menton rond, visage ovale, taille 1,65 m.
degré d'instruction générale : 3,
instruction militaire : exercé
* Le 6 janvier 1897, condamné par le Tribunal Correctionnel de Mamers à 24 heures de prison pour vagabondage (sursis).
* Le 4 mars 1898, condamné par le Tribunal correctionnel de Rennes à 15 jours de prison pour vagabondage et mendicité (sursis).
* Le 27 avril 1899, condamné par le tribunal correctionnel de Pont-L'Evêque à 15 jours de prison pour vagabondage.
* Le 15 novembre 1899, incorporé au 4e régiment d'infanterie
arrivé au corps le dit jour, numéro matricule 1547.
* Le 20 novembre 1899, réformé n° 2 par la Commission spéciale d'Auxerre pour "pied bot"
* Le 9 février 1900 : mariage avec Marie Pauline Boucher à Ernes.
* 1901 : recensé à Ernes, route de Vendeuvre en compagnie de sa femme Marie Pauline.
* Le 30 octobre 1901, condamné par le Tribunal Correctionnel de Falaise à quatre mois de prison pour complicité de vol par recel.
* Le 12 avril 1904, condamné par le Tribunal Correctionnel de Rambouillet à 15 jours de prison pour vagabondage.
* Le 2 juin 1905, condamné par le Tribunal Correctionnel de Lisieux à 3 mois de prison. Confusion avec la peine de 6 mois d'emprisonnement pour vol, abus de confiance et vagabondage prononcée à la même audience pour vol.
* Le 28 juin 1905, condamné par le Tribunal Correctionnel de Caen à six mois de prison. Peine confondue avec celle de 3 mois de prison pour vol prononcée par le Tribunal de Lisieux le 2 juin 1905. Sur appel d'un jugement du Tribunal de Lisieux le 2 juin 1905 pour vol, abus de confiance et vagabondage.
* Le 15 avril 1915, la décision de réforme est maintenue par la Commission Médicale. Infirmité évidente. Rapport spécial du 12 mai 1916 / n° 34 bis.
* Le 30 mars 1917, la décision est maintenue lors de la séance de la Commission de réforme du Tarn-et-Garonne (Loi du 20 février 1917)
* Le 28 mars 1917, condamné par le Tribunal Correctionnel de Moissac à 4 mois de prison pour vol.
* Le 11 mai 1923, condamné par le Tribunal Correctionnel de Bressuire à 2 jours de prison pour défaut de vaccination.
* Le 10 novembre 1927, Libéré du service militaire.
Amnistié. Loi du 3-01-1925.
Signé : Le Commandant de Recrutement
... on perd sa trace jusqu'à son décès, vingt-cinq ans plus tard, en 1953, à Trissereux dans l'Oise (mention marginale portée sur son acte de naissance).
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