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Je suis un intellectuel assis...
... mais je vais loin. La preuve ci-dessous.
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Dans "Un taxi pour Tobrouk", film français réalisé en 1961 par Denys de la Patellière, le génial dialoguiste Michel Audiard met dans la bouche de François Gensac (Maurice Birault) s'adressant à Samuel Goldmann (Charles Aznavour) l'aphorisme suivant : "Deux intellectuels assis vont moins loin qu'une brute qui marche" (extrait ci-dessous). Interrogeons la véracité de cette affirmation.
Cette phrase connaît un grand succès et a été reprise avec diverses formulations : les deux intellectuels ne font généralement plus qu'un et la brute se change tour à tour en imbécile ou en con. Des paraphraseurs poussent même l'inculture jusqu'à attribuer le dit aphorisme à un certain Erwan, candidat de l'émission de téléréalité "Secret story" (saison 1, 2007). Il est probable que ceux-là ne savent pas qui furent Audiard ou Birault, ni même que les films furent jadis en noir et blanc.
Parlons de moi, ça m'intéresse !
Si vous m'autorisez à m'intéresser au cas du petit vermisseau amoureux des étoiles que je suis, je vous révèlerai que, non content d'avoir mis un pied sur Mars (voir ma publication précédente), j'ai voyagé dans les espaces galactiques et même cosmiques. En effet, depuis ma naissance, au siècle dernier, j'ai déjà traversé une partie non négligeable, bien que modeste, de l'Univers. Je ne parle pas de mes cavalcades dans la cour de récré, ni de mes aller-retour dodo-boulot-dodo, ni de mes piétinements dans les super-marchés, ni même de mes voyages, non. Mais je parle des plus de 1 800 000 000 000 km parcourus entre les étoiles et au delà. Oui, c'est bien ça : mille-huit-cents milliards de kilomètres (*) traversés sans effort et sans m'en rendre compte, en position debout, assise ou même couchée. Bon, d'accord, à l'échelle d'un vermisseau c'est impressionnant. Mais cela ne représente après tout qu'à peine un cinquième d'une année-lumière, c'est à dire tout juste un petit tortillement à l'intérieur de notre Galaxie qui est cinq-cent-mille fois plus grande.
Et vous, où en êtes vous ?
Le temps que vous finissiez de lire ce paragraphe, le cul bien calé sur votre chaise, vous aurez parcouru 9 km grâce à la rotation de la terre sur elle-même, vous vous serez déplacé·e de 900 km, emporté·e par la Terre dans sa révolution autour du Soleil, vous vous retrouverez 6600 km plus loin, entraîné·e par le Soleil dans sa course autour du trou noir géant situé au cœur de notre Galaxie et la Galaxie tout entière vous aura rapproché·e de 17000 km du Grand attracteur. Alors ? un·e intellectuel·le assis·e va-t-il·elle vraiment moins loin qu'une brute qui marche ?
Et au total, ça donne quoi au compteur ?
Expliquons, éduquons (*)
Le premier mouvement que nous subissons sans même bouger notre fessier est lié à la rotation de la Terre. Chacun peut facilement prendre conscience de cette mobilité passive en notant que la position du soleil change dans le ciel au cours de la journée. On sait depuis Copernic et Galilée que cette position changeante ne vient pas de ce que le Soleil bouge mais plutôt de ce que la Terre effectue un tour complet sur elle-même (sur son axe passant par les pôles) en 24 heures, devant un Soleil relativement immobile (*). La vitesse d'une personne assise à la surface de la Terre, forcément entraînée dans son mouvement de rotation qu'elle soit intellectuelle ou pas, dépend de sa position par rapport au pôle, donc de la distance à laquelle elle se trouve de l'axe de rotation.
Non loin des pôles, disons à une distance d'environ 13 km de l'axe de rotation, une personne courageuse pourrait se lever et suivre la rotation de la planète à pied en marchant tranquillement à 3,5 km/h. En revanche, si elle se trouvait près de l'équateur, c'est à dire à 6371 km de l'axe (valeur moyenne du rayon de la Terre), elle aurait devant elle la plus grande distance possible pour faire un tour de la Terre (environ 40 000 km) en une journée. Admettez qu'il n'est pas question de le faire à pied ! Mais puisque la Terre tourne, elle pourrait rester assise et "voyager" - sans bouger - à environ 1666 km/h (40000 km / 24h). À la latitude de la France, sa vitesse ne serait "que" 1100 km/h, plus ou moins selon qu'on se trouve à Dunkerque ou à Bastia.
Et pourtant elle tourne...
Par ailleurs, n’oublions pas que notre jolie planète bleue tourne aussi autour du Soleil. Il lui faut parcourir une ellipse de près de 1 milliard de kilomètres en 365 jours et 6 heures. Sa vitesse moyenne (la nôtre aussi, par la force des choses) atteint alors plus de 107 000 km/h (cent-sept mille kilomètres par heure, près de 30 km/s).
Eh bien si, nous tournons autour du pot
La terre tourne donc sur elle-même et, en même temps, autour du Soleil. Mais notre ballet cosmique ne s'arrête pas là. Le Soleil, notre étoile, entraîne ses planètes (et nous avec) dans une révolution autour du Trou noir qui habite le centre de notre Galaxie (*). Il faut environ 220 millions d'années, durée de l'année cosmique, pour que le Soleil boucle un tour complet. Ce périple de notre étoile s'effectue à une vitesse qui dépasse alors tout ce que nous avons déjà relevé puisqu'elle atteint 792 000 km/h (sept-cent quatre-vingt-douze mille kilomètres par heure, 220 km/s). Voyez la simulation ci-dessous.
Trajectoire du Soleil et du système solaire dans la Galaxie
Plein pot vers la fin de l'histoire ?
Si vous pensez que la rotation de la Galaxie est la fin de l'histoire, vous vous trompez. Notre Galaxie se déplace également dans l’espace comme un ensemble dans une relation gravitationnelle avec les autres galaxies de notre "Groupe local" de galaxies (par exemple Andromède ou les Nuages de Magellan). L'amas de galaxies que constitue le Groupe local (nous sommes dedans) est, de surcroît, attiré par un autre amas plus gros, l’amas de la Vierge (*), à la vitesse de plus de deux millions de kilomètres par heure (630 km/s). - Et l'amas de la Vierge ? demanderez-vous avec juste raison. Il se précipite lui-même vers le mystérieux "Grand attracteur". Ça donne le vertigo, n'est-ce pas ! Écoutez et regardez les explications d'Hélène Courtois, la spécialiste de la question.
Quelques vidéos pour encore mieux comprendre
- le continent cosmique Laniakea (résumé France 3 Rhône-Alpes), voir ci-dessus
- Conférence à l'Académie des Sciences (en français)
- Le Grand attracteur (Exposé CNRS-CEA - en français)
- Le continent cosmique Laniakea (publication dans Nature - en anglais)
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