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Saint-Germain-en-Laye: lycéen boursier
Précédemment (*), nous avons fait la connaissance de Madame Mercier, institutrice de la classe unique fréquentée par le cousin Milan, dans le petit village de Saint-Aquilin-de-Passy dans l'Eure. Voici un cinquième extrait qui clôt la période (*).
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“Qui a connu l’internat sait, à l’âge de douze ans, presque tout ce qu’il faut savoir sur la vie.” - Gustave Flaubert
Pour entrer au lycée, il fallait subir une épreuve, l’examen d’entrée en sixième. Peu après avoir satisfait à cette obligation,les résultats furent transmis à Madame Mercier. J'étais reçu, avec une excellente note. Heureusement qu’il n’y avait pas eu de partie orale, donc pas de récitation. Ce sujet m’aurait coulé. Elle entreprit aussitôt des démarches pour m’inscrire en internat au lycée de Saint-Germain-en-Laye, en banlieue parisienne. Le proviseur l’avait contactée pour m’offrir une place dans son établissement. Il a vite fallu constituer un dossier, fournir un certificat de naissance, un relevé de mes notes d’école, et surtout postuler à une bourse, sans laquelle je ne pouvais envisager de poursuivre mes études secondaires de cette manière. Elle se chargea des procédures nécessaires. Mon cas semblait progresser sans heurts quand soudain nous avons dû faire face à un problème totalement imprévu. Le rectorat avait envoyé un télégramme à Madame Mercier pour lui demander d’ajouter un certificat de nationalité française à ma candidature de bourse. Branle-bas... Personne n'avait songé à cette question. Kovacovic, un nom plutôt slave... Étais-je français ou non ? Monsieur Mercier se renseigna sur le jus soli, la loi du sol, et le jus sanguinis, la loi du sang. En catastrophe, car nous étions déjà en juillet, il a fallu que je comparaisse devant le juge de paix de Pacy-sur-Eure pour effectuer une déclaration formelle, sans laquelle le jus soli ne comptait apparemment pas. Jusqu’alors, né et élevé dans le village de Saint-Aquilin, je m'étais cru simplement normand. Comme j’étais un mineur de 10 ans, je devais être accompagné d’un adulte. Maman descendit exprès de Paris, et devant elle, le juge de paix me déclara officiellement de nationalité française. C’était en fait une formalité banale mais nécessaire. Êtes-vous la mère lui avait-il froidement demandé. Je ressortis de son bureau cependant profondément ému, car j'avais l'impression d'avoir été adopté par une protectrice très puissante, la République, qui serait dorénavant garante de mon avenir avec la bourse.
Après le délai imprévu au sujet de ma nationalité, je reçus enfin ma lettre d'affectation, annonçant à mon père qu’une bourse nationale m’était octroyée pour l’intégralité de mes frais de logement, de nourriture, et de scolarité. Pas un sou à débourser ! Je serais donc interne au lycée de garçons, Rue Léon Desoyer à Saint-Germain. Les parents ou les correspondants étaient invités à accompagner les nouveaux élèves jusqu'au parloir à l'entrée de l'établissement le jour de l’inscription. Arrivés là, nous ne trouvons qu’un seul point d’accès : une grande porte cochère fermée, munie d’une petite entrée attenante, à travers laquelle les gens entrent et sortent en file indienne, comme une procession de fourmis. Puis juste à l’intérieur, la loge du concierge qui surveille les allées et venues, et à côté, le parloir. Avec un cœur lourd et après de longues embrassades, nous nous quittons les larmes aux yeux. Traînant ma valise sur l’asphalte de la cour, je me dirige vers le surgé, le surveillant général, un colosse court sur pattes vêtu d’un costume noir élimé aux coudes et portant un grand béret qui lui tombe de côté sur l’oreille. Sa moustache de morse et sa panse protubérante débordant de sa veste déboutonnée lui donnent l’allure d’un ours mal léché. Sa poitrine est bardée d’un sifflet, d’une chaîne de montre, d’une paire de bretelles, et d’une cravate de propreté douteuse, sans doute des taches de soupe. Je le devine cependant plus affable que ne le laisserait croire son aspect bourru. De sa voix tonitruante, il aboie dans la cour des ordres qui se réverbèrent dans l’ensemble de l’établissement. Lorsque j’arrive devant lui, il se présente : “Bonjour jeune homme, j’ suis M’sieur Blau, l’ surgé, et toi ton nom c’est quoi ?” “Kovacovic” “Ah non, c’est trop long, j’ vais t’appeler Kovaco”. Puis il pointe le doigt vers la cage d’escalier dans le coin le plus éloigné de la cour et me dit d’aller choisir un lit “en haut, au quatrième dortoir”. Et il enchaîne : “Encore une chose Kovaco. Soulève ta valise, traîne-la pas par terre comme ça”.
Alors que je marque une pause au pied de l'escalier, un garçon nettement plus âgé que moi dévale les marches à toute allure. Sans ralentir sa course, il me lance en ricanant : “Fais gaffe, l’ nouveau, t'as intérêt à pas t' gourer d' dortoir si tu veux pas t' faire bizuter !” Quoi ? J'imagine sans très bien comprendre le sens de cette menace, qu'il s'agit de violences pour intimider les nouveaux élèves. L'angoisse me saisit, le sentiment d'avoir été jeté dans la fosse aux lions. La peur aidant, je prends une décision : je me battrai de toutes mes forces si l'on m'attaque, mais je ne réagirai pas aux provocations verbales. Avant d'affronter l’escalier lugubre, je reviens vers la cour aspirer une bouffée d'air frais pour me donner courage. Mais la vue des bâtiments de brique entourant la cour, les quelques arbres chétifs au milieu, le grillage masquant les vitres des salles de classe sur le pourtour du rez-de-chaussée, les toits d’ardoise à pic, le long préau sous lequel en guise de fontaine coule l'éternel filet d'eau des pissotières, tout contribue à évoquer l'ambiance d'une prison sordide. Le dortoir ne vaut guère mieux. Il ressemble à un sanatorium. Une cinquantaine de lits très étroits en métal sont disposés le long de chaque côté de la salle. Malgré la blancheur éclatante des draps, la propreté des murs repeints à la chaux pendant l'été, l'impeccable netteté du plancher récemment passé à l'encaustique, et malgré l'aération générée par les courants d’air des fenêtres opposées, une sensation d’enfermement collectif m’assaille, déclenchée peut-être par la vue déprimante des matelas aussi minces que des couchettes. Et pas d’oreillers sur les lits, seulement des traversins.
Le premier soir avant le coucher, le pion qui nous surveille lance un ordre : “Tout le monde aux lavabos, allez vous brosser les dents.” “Brosser ?” Au village on disait “se laver les dents.” Je n'ai pas de brosse. Je me contente d'observer, de faire semblant, et dans la cohue des lavabos, d'imiter les gestes des autres, surtout ceux des Noirs et des Arabes qui se massent les gencives avec l’index. Je décide toutefois qu’à ma première sortie, j'achèterai une brosse ainsi qu'un tube de dentifrice. Avant l'extinction des lumières, le pion continue l'orientation : “Les douches auront lieu une fois par semaine dans le bâtiment d'en face, après la promenade du jeudi au stade ou en forêt. Vous y laisserez aussi vos sacs de blanchisserie : changement de linge de corps obligatoire ce jour-là. Interdit de lire après l'extinction des lumières. Si j’ vois des loupiotes allumées sous les draps, j' les confisque. C'est compris ? Bonne nuit !”. Ma valise bon marché, attachée au milieu par une ceinture, détonne par rapport à celles des autres élèves, souvent décorées d’insignes. Par exemple celle d’un de mes voisins porte l’image d’un paquebot et l’inscription “Cie Générale Transatlantique”. Je pousse la mienne sous mon lit, avec l'intention de m'en débarrasser à la première occasion, quitte à expliquer plus tard à Maman qu'on me l'a volée. D'ailleurs elle n'aura sans doute plus jamais l'occasion de venir au lycée, et si oui elle ne pourra pas pénétrer à l’intérieur plus loin que l’entrée. J’entendrai un coup de sifflet de M’sieur Blau suivi d’un retentissant “KOVACO AU PARLOIR”. Un vœu pieux... Le premier samedi après-midi a été l'un des plus tristes moments de ma vie. Le lycée s’est vidé ce jour-là, non seulement des externes domiciliés aux alentours de Saint-Germain, mais aussi des internes qui rentraient dans leurs familles à Paris.
Et le dimanche, c’était pire encore. Les Français des colonies, ou les Indigènes vietnamiens, noirs, ou arabes, sortaient chez leurs correspondants de la capitale pour l'après-midi. Ne restaient plus alors au lycée que les consignés et les laissés pour compte de l'internat, ainsi qu'un malheureux garde-chiourme pour les accompagner à la promenade en rang sur l'esplanade du Château. L'échine brisée par le cafard, le groupe n'avait que faire du panorama sur la Seine, avec la Tour Eiffel à l’horizon. Les consignés ne chahutaient même plus : à quoi bon narguer le pion, qui était là lui aussi contre son gré, à quoi bon se faire des croche-pieds dans les rangs ? L'essentiel pour moi à ces débuts était de ne pas pleurer. J'avais honte de ma tristesse, mes camarades me paraissaient plus endurcis. Nombre d'entre eux avaient déjà séjourné loin de leurs proches, pour des stages linguistiques en Angleterre ou ailleurs, sans parler des “Outremers” envoyés étudier en France par leurs parents. En rentrant au dortoir le dimanche soir, certains parlaient de projets de sports d'hiver à Megève, de disques de jazz, d'électrophones, de concerts de Sydney Bechet à l’Olympia, de choses inconnues pour moi. Je feignais de comprendre de quoi il s’agissait. Mais je ne pense pas qu’ils appréciaient comme moi le simple plaisir de déambuler dans les rues de Paris. L’une des seules choses que nous avions en commun, pour des raisons opposées, était un attachement divisé à parts égales entre nos parents et nos nounous, ou dans mon cas mes anges-gardiens au village.
Maman ne voulait pas abuser de l’hospitalité des Kapferer, donc nous avions décidé que je ne lui rendrais visite que le dernier dimanche après-midi de chaque mois. Et nous n’avions rien prévu pour les congés scolaires d’environ une semaine tous les deux mois, ni pour les grandes vacances, où il fallait obligatoirement évacuer les lieux. Je ne pouvais pas imaginer retourner vivre à Saint-Aquilin. Ce serait trop douloureux, à l’exception de brèves visites pour rester en contact avec Pépère et Mémère, et en même temps fleurir la tombe de mon père. Après deux pitoyables week-ends confiné au lycée, un miracle eut lieu dans le réfectoire au moment de la distribution du courrier. Alors que je ne m’attendais aucunement à recevoir de lettres, M’sieur Blau me lança un clin d’œil et prononça de sa voix de stentor trois syllabes KO-VA-CO qui signalèrent le début de cette cérémonie quotidienne, et firent taire le vacarme des ustensiles et des conversations. C’était une lettre de Madame Kapferer, exprimant sa surprise de ne pas m’avoir revu chez elle depuis le commencement des classes. Elle m’invitait à me sentir comme chez moi dans sa maison, du samedi au dimanche, chaque semaine et pendant tous les congés scolaires, y compris les grandes vacances. “Tu seras peut-être un peu à l’étroit pour le moment car je n’ai plus de chambre libre, mais tu pourras dormir dans celle de ta mère sur un lit pliant. Grâce à l’intervention miséricordieuse de Madame Kapferer — une juive sainte et généreuse, vraiment, à qui je serai à tout jamais plus reconnaissant qu’il n’est possible de dire — mon angoisse d’être sans logis s’était évaporée. Non seulement je vivrais maintenant à Paris, mais dans l’un des endroits les plus souhaitables de toute la ville, entre le Bois de Boulogne et le Trocadéro. En lisant la lettre de Madame, j’ai pensé que mon cœur allait éclater !
Toutefois, même avec la question du logement résolue, mon adaptation aux études lycéennes s’avéra très rude. Cette première année, je ramai dans le vide, alors que jusque là j'avais toujours réussi à l'école sans me forcer, sans difficulté aucune. Qu'était-il advenu de mon cerveau ? Il ne me servait plus. Rosa, rosae, rosam, je ne comprenais rien aux déclinaisons latines. Ni à l'anglais, ni au solfège. Assez bon en maths quand même. Nul en dessin. Médiocre en sciences naturelles et en travaux manuels. Pas particulièrement doué en éducation physique. Moyen en français et en histoire-géo. Seule l'orthographe tenait bon, grâce à ma mémoire photographique. Vingt-deuxième sur 34 en moyenne au classement général. Et bien sûr 34ème en récitation. Face à ce désastre, j'en étais venu à craindre de perdre ma bourse, mais cette peur s’avéra infondée. Personne ne critiqua mon travail scolaire, ni ne m'encouragea non plus. Hormis les “Peut mieux faire...” laconiques parsemant mon carnet de notes, pas un mot. La question ne semblait même pas se poser. J'avais perdu ce contact sûr avec le sentiment de connaissance que j’éprouvais grâce à la clarté de l’enseignement de Madame Mercier, ce plaisir de la compréhension immédiate qui avait caractérisé mes années à l'école communale. J'acceptais mes lacunes et mes inaptitudes — il est inutile de chercher à développer un talent qu'on ne possède pas — et je les connaissais d'ailleurs fort bien. Mais je n'acceptais pas, ou tout au moins ne comprenais pas, mon effondrement intellectuel pendant cette première année de lycée. Et je ne pouvais en parler à personne. J’avais l’impression de me noyer.
Au départ, la vie de pensionnaire ne fut pas facile non plus. Si les violences que je redoutais ne se manifestèrent pas, par contre j’ai dû subir comme tous les nouveaux élèves, les brimades des plus vieux. Ainsi,nous étions parfois "virés" de nos lits en pleine nuit par des fantômes malfaisants, disparus sitôt leur mission terroriste accomplie. Les malheureux ronfleurs surtout écopaient de ce traitement cruel. Au réfectoire, nous étions assis par tablées de six de chaque côté d'une allée centrale. Les repas étaient distribués à partir d'un chariot sur des plats en métal dans un tintamarre assourdissant. Les sixièmes, en dernière position, devaient s'accommoder des restes qui parvenaient en bout de table après que les quatrièmes et les cinquièmes s’étaient servis plus ou moins goulûment selon leur fantaisie. Il était exclu de se plaindre au pion, perpétuellement absorbé dans l'étude de quelque planche anatomique ou autre pour son cours de médecine. De toute façon, il ne voulait rien savoir, il souhaitait simplement qu'on lui “foute la paix”. Parfois, touchés quand même par les protestations des brimés, les tortionnaires laissaient poindre un peu leur humanité : “Ta gueule, plus tard ça s’ra ton tour de bizuter les autres”. La nourriture, ou toutefois ce qu'il en restait en bout de table, était variée et d'excellente qualité, avec par exemple du poisson tous les vendredis. J'aimais particulièrement les tomates farcies comme hors-d’œuvre, suivies de bifteck-frites-salade, puis camembert, et yaourts ou fruits comme dessert. Les corbeilles contenaient deux pommes, deux bananes, et deux oranges. Nous nous retrouvions en général avec les pommes, les caïds à la tête des tables s'octroyant les fruits exotiques. Pour le goûter l'on nous distribuait un pain au chocolat, avec un litre de bière pasteurisée pour chaque tablée. Le matin, tartine au beurre et à la confiture, et bol de café au lait. Et à chaque repas, mon aliment favori, qui me manquait à la campagne: du pain à volonté ! Les baguettes étaient coupées en tranches, mais je n’aimais pas les voir servir parfois de projectiles lorsque le pion avait le dos tourné. Ce gaspillage et ces chahuts, heureusement peu fréquents, me choquaient.
Après mes misérables résultats scolaires en classe de sixième, je commençai en cinquième à comprendre le latin et l'anglais, et retrouvai mon ancienne aisance face au savoir. Et à table au réfectoire, je montai d'un cran. Mais surtout, je découvris le football. J'aimais participer aux matchs dans la cour de récré après les repas avec une balle de tennis et même parfois une boîte de sardines ; le sport de stade avec un vrai ballon et des chaussures à crampons m'attirait moins. La classe de quatrième, dont j'étais à l2 ans le benjamin, l'âge normal étant l3 ans, avec aussi un bon nombre de redoublants vers lesquels je gravitais, fut pour moi une année charnière, une période d'épanouissement. Entraîné par mes camarades, je commençai à fumer, en général des américaines de contrebande, délavées pendant leurs transbordements en Méditerranée au large de Marseille ou de la Sicile, puis séchées de nouveau. Les copains arabes en possédaient des cartouches entières, achetées à bas prix. Fraternité de la tabagie, les doigts jaunis, ils nous les revendaient à l ’unité, sans s'octroyer de bénéfices. “T'as pas une sibiche, on va fumer aux chiottes” devint le leitmotiv des récréations.
L’année de quatrième aussi, ce fut mon tour d'être en tête de table au réfectoire. Après la timidité de mes débuts, je me trouvai un certain ascendant, dont je suis fier de n’avoir pas abusé. Le pion arpentait la salle en égrenant sa litanie : “Débrouillez-vous comme vous voulez, j' veux pas de complaintes, j' veux pas d' problèmes, j' veux rien savoir, j'ai un examen à potasser”. De même que je m’étais retrouvé au début à Saint-Germain en classe de sixième classique, section A2, c'est-à-dire Latin-Langue Vivante, je découvris plus tard qu'il existait aussi d'autres options — sixième A1 Grec-Latin, sixième Moderne, sixième Nouvelle — sur le choix desquelles je ne fus jamais consulté ; de toute façon c'eût été peine perdue : ces distinctions et leurs enjeux dépassaient mon entendement. Savait-on au lycée que j'étais boursier ? Je ne le pense pas, quant aux élèves. Les professeurs devaient sans doute en être informés, mais pendant toute mon expérience, je n'en eus l'indication qu'une seule fois, vers la fin de mon année de quatrième, en classe de français. J'étais le premier au résultat d’ensemble du cours; le professeur fit mon éloge, puis se lança dans un sermon qui m'embarrassa plus qu'il n'est possible d'imaginer: “Vous venez tous de familles aisées, et pourtant Kovacovic qui, lui, est de parents modestes, sans livres ni bibliothèque à la maison j’en suis sûr, eh bien il vous devance au classement. Vous devriez avoir honte. Son père est cuisinier. C'est un métier pénible, vous savez, d'être toujours penché sur des fourneaux”. Je sentais mon visage s'empourprer, j'aurais voulu disparaître. Mais personne ne m'en reparla, comme si moi seul dans la classe avais entendu la harangue du professeur, d’ailleurs erronée dans ses faits. L’année suivante, alors que je trouvais mon rythme de croisière dans notre nouveau campus plus accueillant que l’ancien et me faisais de bons camarades, Maman, qui adorait son travail de cuisinière chez les Kapferer, décida que nous devrions émigrer en Amérique, sans qu’elle ni moi n’en sache véritablement la raison. Et inconscient comme elle, je ne m’opposai pas à son projet. Je ne savais pas encore combien nous le regretterions tous les deux..
(1942-2020)
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Ce texte, tout comme ceux qui suivent dans le "cycle Milan", sont publiés ici avec l'aval de Deborah Scott (*)
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4 commentaires
Bel hommage que tu rends à ton cousin en publiant ses mémoires, c’est vraiment une très belle histoire de sa vie j’ai hâte de lire la suite. Bravo et continue c’est parfait.
Merci, Jacques, pour cet épisode qui nous replonge loin, très loin en arrière, avec quelques terreurs et malgré tout de bons moments, mais je n’ai pas connu d’internat ni de bonne cantine tout au long du secondaire.
Maintenant c’est au tour de ma fille…
Lycée = Collège ???
** Réponse de Jacques : oui, dans les années 1950, le collège unique n’existait pas encore. Les classes “collège” étaient au lycée.
C’est vrai qu’il nous a fallu passer un examen pour entrer en 6ème ! Je fus boursière également dans mes premières années de lycée (jacques Amyot à Melun). Cela ravive plein de souvenirs !
Cette lecture fait remonter des souvenirs du fond de ma mémoire. Souvenirs pas toujours très agréables, car les conditions de vie dans un collège d’un coin perdu de la Marne n’étaient pas celles de la banlieue plus aisée de Saint-Germain en Laye. En particulier pendant plusieurs semaines d’hiver, nous échappions à la “corvée” de toilette pour la simple raison que dans cet établissement vétuste sans chauffage, les conduites d’eau étaient gelées… Mais je dois reconnaître qu’il y a eu aussi d’excellents moments, même si le régime alimentaire d’après-guerre était plus que frugal, et si les ch… à la turque avaient souvent un aspect dissuasif….
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