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17/03/2012

Les derniers passages de Vénus (2) - Expéditions de l'abbé Chappe

  20:17:00, par Jac Lou   , 1529 mots  
Catégories: Astronomie

[La Nature, 1874, pp. 374-375]

LES VOYAGES DE L'ABBÉ CHAPPE D'AUTEROCHE.
2. En Californie

L'abbé Chappe partit de Paris le 18 septembre 1768, et s'embarqua pour Cadix, afin d'attendre dans ce port la flotte des galions qui se rendait annuellement dans le nouveau monde. Mais les autorisations nécessaires n'étant point arrivées à temps, M. l'abbé dut fréter un petit brigantin, pour se rendre directement à la Vera-Cruz, où il n'arriva que le 6 mars del'année suivante. Il était accompagné par MM. d'Oz et Medina, officiers de la marine de Sa Majesté Catholique.

La traversée avait été de 77 jours, de sorte que l'équipage el les passagers mouraient de faim en arrivant au port. En outre, le capitaine eut la malencontreuse idée d'arborer le pavillon français pour demander un pilote, de sorte que le brigantin faillit faire naufrage au port.

Après quelques difficultés nouvelles le vice-roi du Mexique envoya une escorte d'honneur au-devant des voyageurs, leur fit visiter Mexico, et les fit reconduire jusqu'à San Blacas, petit port situéà l'embouchure du Rio Grande, d'où s'embarquaient les troupes pour la mer Vermeille.

L'abbé Chappe passa par Querétaro, cent ans presque jour pour jour avant la tragédie dont il y a un siècle personne ne pouvait même prévoir la nature.

Le 19 avril seulement l'expédition quittait le port de San Blacas. Un mois après l'académicien français débarquait au port de Saint-Joseph, après une traversée longue, pénible et même périlleuse. Il lui restait à peine le temps nécessaire pour disposer les instruments. Heureusement il y avait daus le pays une mission catholique pour la conversion des Indiens, et M. d'Auteroche fut reçu avec courtoisie en qualité de prêtre.

On mit à sa disposition une vaste grange, dont il se borna à faire enlever une moitié du toit, celle qui regarde du côté du midi, pour y mettre simplement des toiles qui pussent s'étendre et se replier à volonté.

C'est seulement le 30 mai que les instruments se trouvèrent orientés et disposés d'une façon convenable. On construisit trois piédestaux en maçonnerie pour asseoir solidement un quart de cercle de trois pieds, un instrument des passages et une machine parallactique, apportés de Paris, ainsi qu'une lunette de dix pieds. Ce dernier appareil fut soutenu par une poutre de 9 pouces de diamètre, portant une potence qui tournait autour d'un axe vertical. Enfin, l'horloge fut fixée contre un bloc en bois de cèdre, que l'on avait apportéde San Blacas pour cet usage.

Chappe, ses aides et l'officier espagnol, Vincent d'Oz, employèrent tous les jours qui précédèrent l'observation à suivre la marche de la pendule avec l'exactitude la plus scrupuleuse.

Le 6 juin, le ciel était d'une pureté remarquable, et aucun phénomène n'échappa à l'observateur.

En entrant sur le soleil, le bord de Vénus s'allongea comme s'il avait été attiré par l'astre, il se forma un point noir ou ligament obscur un peu moins noir que le corps de l'astre et dont nous avons donné la figure. Le même phénomène se produisit lors du second contact interne.

Cette observation, faite dans de bonnes conditions, fut excellente. Chappe mesura le diamètre de la planète à plusieurs reprises et le trouva constamment égal à 57°8; mais ayant cherché à le déterminer par le temps qu'elle mettait à traverser le bord du soleil, il ne la trouva plus que de 56°4.

La méthode de Delille, qu'employaient pour les calculs les astronomes de l'Académie, exigeait la connaissance parfaite de la longitude de Saint-Joseph. Celte condition ne pouvait être remplie qu'à l'aide d'observations nombreuses d'éclipses ou de passages, auxquelles Chappe se livra avec une excessive ardeur.

Il régnait dans le canton une épidémie dangereuse de "vomito negro", dont Chappe fut attaqué. Il avait presque échappé, était entré en convalescence, lorsqu'arriva l'éclipse de lune du 18 juin. Malgré son grand état de faiblesse, il ne voulut pas se priver d'un moyen si énergique d'accomplir sa mission, et il passa la nuit en observation. Le lendemain la maladie le saisissait de nouveau, et douze jours après il n'était plus qu'un cadavre !

« Je sais que je n'ai plus que quelques heures à vivre, disait-il à ses amis avant que l'agonie ne commençât, mais je meurs content, car j'ai accompli la mission que m'avait donnée l'Académie des sciences. »

W. De Fonvielle.

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