« Acad. - Nouvelles de Pékin et île Saint-PaulL'occultation de Vénus par la Lune en 1874 »

30/03/2012

Passage de Vénus et mesure des distances inaccessibles

  01:15:00, par Jac Lou   , 3520 mots  
Catégories: Astronomie

Mais ce n'est pas tant sa rareté que son importance uranographique, qui donne à cet événement toute sa valeur et toute sa renommée. En se dessinant sur le disque lumineux du soleil, la planète Vénus offre aux astronomes un moyen précieux de calculer la distance qui nous sépare du soleil lui-même. Ajoutons maintenant qu'indépendamment de l'intérêt particulier qu'elle peut nous offrir en elle-même, celle distance est la base de tontes les mesures astronomiques. Qu'elle soit fausse, tous les chiffres donnés pour la mesure des distances des planètes, des comètes ou des étoiles sont erronés eux-mêmes. Qu'elle soit exacte, et nous avons en mains le mètre du système du monde et de toutes les évaluations de distances célestes. On s'explique donc sans peine tout le bruit qui se fait depuis plusieurs années à l'égard de cette intéressante planète, que les astronomes avaient un peu délaissée depuis le siècle dernier ; on comprend tous les préparatifs entrepris pour distribuer sur le globe les meilleurs postes d'observation, de chacun desquels on pointera avec la plus grande précision possible la route suivie par Vénus sur le disque solaire. C'est par la réunion et par la comparaison de toutes les observations que l'on déterminera l'angle sous lequel la grandeur de la terre serait vue du soleil, angle qui donne la distance du soleil à la terre, ou, en termes consacrés, la parallaxe du soleil.

Examinons d'abord la méthode employée pour la mesure des distances inaccessibles.

On sait que les mesures des grandes distances et des distances inaccessibles ne se prennent pas directement en portant un mètre, un décamètre, sur leur longueur ; mais géométriquement, par la formation de triangles. Cette dernière méthode de mesure, que l'on pourrait appeler théorique, est aussi exacte que la première, que l'on pourrait appeler pratique et usuelle. Il faut même dire qu'elle est plus exacte car elle diminue les erreurs d'observation. Si, par exemple, on détermine par la géométrie la distance d'un point de la façade de l'Observatoire à un point de la façade du palais du Luxembourg, on peut trouver un chiffre exact à un centimètre près, quoique la distance soit supérieure à un kilomètre, résultat qu'on n'obtiendrait pas en portant directement une chaîne d'arpenteur le long de l'avenue de l'Observatoire. Il est inutile, d'ailleurs, d'ajouter que la méthode pratique serait impossible à employer dans les cas de distances inaccessibles, et dans ceux où les distances dépassent une certaine longueur. Le premier qui essaya de mesurer un degré du méridien de la France, le médecin Fernel, en 1528, prit directement, il est vrai, cette mesnre, en comptant les tours de roue de sa voiture le long de la route de Paris à Amiens, et par une singulière compensation entre toutes les causes d'erreurs inhérentes à ce procédé, le chiffre trouvé (56,070 toises), ne diffère pas de mille toises avec le chiffre donné plus lard par des opérations strictement scientifiques. Mais les instruments de mesure, la trigonométrie et les logarithmes ont conduit à une précision incomparablement plus grande. En 1669, Picard, membre de l'Académie des sciences, fondateur de l'Observatoire de Paris, mesura la distance entre Paris et Amiens, c'est-à-dire entre le 48e et le 49e degré de latitude, en choisissant d'abord sur le sol une base, qu'il mesura exactement, et sur laquelle il établit, pour déduire ensuite par le calcul la longueur cherchée, un réseau de triangles ayant alternativement leurs sommets placés à droite et à gauclie de l'arc à déterminer, et il trouva pour la longueur d'un degré dans cet intervalle 57,060 toises, qui répondent à 111,212 mètres. Cette mesure, vérifiée depuis par les géomètres les plus éminents, a été trouvée exacte, à une minime fraction près. Un de ses résultats les plus heureux, c'est qu'elle a, pour ainsi dire, préservé du néant la découverte de l'attraction. Lorsqu'on 1666, Newton découvrit l'identité de la pesanteur avec la force qui soutient la lune autour de la terre et les planètes autour du soleil, il ne put vérifier l'exactitude de son idée, l'appréciation géographique du degré terrestre (49,540 toises) étant alors erronée, et la loi du carré des distances se trouvant fautive, il abandonna tout à fait ses travaux. Ce n'est qu'après la mesure de Picard, en essayant si le nouveau degré s'accordait avec sa théorie qu'il trouva celle-ci parfaitement exacte. De 1683 à 1718, la ligne mesurée de Paris à Amiens fut prolongée d'une part, jusqu'à Dunkerque, et de l'autre, jusqu'à Perpignan et le méridien, qui coupe la France dans sa plus grande longueur, de 8 degrés, fut entièrement fixé par un ensemble d'opérations à la fois astronomiques et géodésiques. Alors un réseau de triangles enveloppa du nord au sud le méridien central, et la carte de France fut exactement tracée pour la première fois. L'un des résultats inattendus de cette opération lut de resserrer les frontières du royaume, ce qui fit dire à LouisXIV, eu plaisantant que " Messieurs de l'Académie avaient enlevé au roi une partie de ses Etats. »

Lire la suite page 4 ...

>> Menu des articles sur le passage de Vénus en 1874 (clic)

Pages: 1· · 3· · 5· 6· 7

Mots-clés: , ,
 PermalienLaisser un commentaire » Partagez » Partagez cet article sur Facebook Partagez cet article sur Google+

Aucun commentaire pour le moment


Formulaire en cours de chargement...